La Chasse aux Pauvres
Sarkozy menace les plus démunis
Bas les masques. Les propos du président de la République à Cahors devraient lever encore quelques illusions là où elles perdurent. “ Les politiques sociales ne peuvent continuer ainsi à alimenter le déficit et la dette ”. On pense à la Traversée de Paris, le film avec Jean Gabin et Bourvil : “ Salauds de pauvres! ”. Car ce sont bien eux, n’est-ce pas, à entendre Sarkozy, qui sont désormais responsables des maux de la France. Il faut tout de même avoir été doté d’un bagage de bas cynisme pour lancer une phrase comme celle-ci. Surtout quand on affiche un objectif de réduction de 7 milliards par an de la dépense publique, après avoir fait voter pas plus tard qu’en juillet dernier un paquet fiscal de 15 milliards ne profitant qu’aux plus riches. Du cynisme, parce que Sarkozy, cette fois, a franchi un cap qu’il avait eu soin jusqu’alors de tenir dans la brume. Il ne s’agit plus seulement de tailler dans la fonction publique, dans les dépenses de l’État, mais bien de désigner comme coupables de mise en péril de l’État les érémistes, les chômeurs après les retraités et les malades. Car ce qui est trop, il vient de le dire noir sur blanc, c’est fondamentalement la dépense sociale.
La semaine passée, un sondage du Figaro prétendait que 71 % des Français étaient favorables à une réduction des dépenses publiques. Un résultat qui venait à point dès lors que l’on affirme en tous lieux et sur tous les tons que l’État dépense trop, que les fonctionnaires sont payés à ne rien faire, que les profs sont pléthore et enseignent des billevesées héritées de Mai 68 entre autres. Mais ces Français doivent savoir aujourd’hui que ce ne sont pas les prétendus abus des politiques publiques qui sont réellement visés mais eux-mêmes et les plus modestes, les plus fragiles.
Et c’est à tous ceux-là que le chef de l’État, celui qui se prétendait le président de tous les Français, le président du pouvoir d’achat, promet en plus des sanctions. Elles seraient prises, a-t-il déclaré, contre ceux des chômeurs qui refuseraient deux offres d’emploi acceptables. Qu’est ce que cela veut dire ? N’importe quoi, n’importe où, n’importe comment, à n’importe quelles conditions ? Mais le propos de plus est retors. Dans la pensée de cette droite, dans cette pensée de classe, de privilégiés, les pauvres ne sont pas seulement pauvres, ils sont coupables, c’est dit, mais c’est leur pauvreté qui coûte cher. Ce n’est pas la situation qui est faite à des millions de citoyens qui est insupportable, non, ce qui est insupportable, ce sont ces citoyens eux-mêmes et ils ont à cet égard d’autant plus de devoirs. “ Il ne peut y avoir une société qui ait des droits sans devoirs ”. Mais où sont les droits de ceux qui n’ont pour vivre que le RMI ou les ASSEDIC ? De tous les précaires qui ne touchent par mois qu’une portion de SMIC et ne parviennent même pas à se loger ? De ceux qui voudraient bien reprendre un travail s’ils en trouvent mais que cela pénalise. C’est à cette situation, on le sait, que devait remédier le RSA, le revenu social d’activité de Martin Hursch. Il passe à la trappe. “ Il faut le calibrer en fonction des disponibilités financières qui sont les nôtres ”, a dit Sarkozy. Merci, Martin Hirsch, vous pouvez disposer. Où sont en revanche les devoirs de Mittal et du président à Gandrange, les devoirs des entreprises qui licencient par convenance boursière, les devoirs des grands groupes et de leurs actionnaires ? Ils n’ont pas de devoirs envers la nation, mais tous les droits d’en profiter.
Le discours de Cahors est le plus antisocial que la France ait connu depuis des décennies n